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L'Italienne à Alger : Orient potache

L'Italienne à Alger, un des opéras de Rossini les plus jubilatoires. © Danielle Pierre

Le duo Malgoire-Schiaretti nous offre sur la scène du Théâtre des Champs-Élysées le chef-d'œuvre buffa de Rossini.

Rien ne vaut un bon cliché! Dans l'imaginaire occidental, l'Orient occupe une place de choix où les chromos le disputent à la caricature. Du grand Mamamouchi aux imageries coloniales, turbans et minarets ont toujours inspiré la propagande et la farce. L'Orient, c'était l'ailleurs, le voyage incontournable, l'étape nécessaire à toute formation esthétique. C'était aussi un monde étrange, facile à tourner en dérision et qui fit les beaux soirs de nombreux opéras. Les Indes galantes de Rameau mélangent Incas et Indiens dans une même cuve, tandis que L'Enlèvement au sérail invente un Orient de fantaisie, où le tyran assassin se cache toujours sous le burnous. À bien y regarder, cette forme d'humour (très drôle) est parfaitement impraticable aujourd'hui. Rameau, Mozart, Molière et Rossini rendent la galéjade acceptable. Remplacez-les par un humoriste ou imitateur et vous êtes crucifié par le politiquement correct. C'est qu'il est redoutablement drôle et ridicule, le Mustapha de L'Italienne à Alger. Frère jumeau du Turc en Italie, qui inverse la proposition mais n'atteint pas au même bonheur, cet opéra est parmi les plus jubilatoires de Rossini. Encore une œuvre éruptive, écrite dans la précipitation (un petit mois), la rapidité même de sa composition donnant à la partition une vigueur, une alacrité, une folie contenue.

Cinglerie

Isabelle est aussi belle qu'une Italienne peut l'être, en 1813; la voilà traversant la Méditerranée, pour aller libérer Lindoro, son amant, prisonnier du terrible Mustapha. Commence une épopée potache, avec grelots, accents imités, chocs des cultures, eunuques gouleyants et autres grimaces levantines. Pour donner à cette œuvre la cinglerie qui s'impose, il faut que l'agilité vocale soit au diapason du tempérament scénique. L'esprit buffa est ici essentiel; sans lui, la légèreté s'empâte et l'opéra peut même devenir indigeste.

Charge à Anna Reinhold et Sergio Gallardo de nous montrer de quel bois ils vont nous chauffer. Fieffé homme de théâtre, c'est surtout au metteur en scène Christian Schiaretti que reviendra la lourde (mais merveilleuse) tâche d'insuffler ici la muse légère et de donner des ailes à cette Italienne. Dans la fosse, c'est le vétéran Malgoire qui s'agitera. Rossini, c'est bien sûr l'Italie, le soleil, la virtuosité, le bel canto; mais c'est encore Mozart. Et ça, en «baroqueux» de talent, il ne devrait pas l'oublier.

«L'Italienne à Alger». Théâtre des Champs-Élysées. 15, av. Montaigne (VIIIe). Tél.: 01 49 52 50 50. Dates: du 8 au 10 juin. Places: de 5 à 110 €.

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