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Un Enlèvement très Sturm und Drang

Paris
Théâtre des Champs-Elysées
11/13/2016 -  
Wolfgang Amadeus Mozart : Die Entführung aus dem Serail, K. 384
Olga Peretyatko (Constance), Pavol Breslik (Belmonte), Claire de Sévigné (Blonde), Michael Laurenz (Pedrillo), Nahuel di Pierro (Osmin), Sam Louwyck (Pacha Selim)
Zusatzchor Opernhaus Zürich, Orchestra La Scintilla Zurich, Maxim Emelyanychev (direction)


M. Emelyanychev (© DR)


Avouons qu’on allait d’abord entendre cet Enlèvement au sérail pour le bouillant et iconoclaste Teodor Currentzis, l’enfant terrible de la direction d’orchestre. Le jeune Maxim Emelyanychev, vingt-huit ans seulement, n’avait donc pas la tâche aisée. Or il nous a conquis ! Certes il a un côté Currentzis, à travers cette direction souvent à la serpe, vif-argent, en rupture avec une certaine tradition d’équilibre classique. Mais voilà un chef, un vrai, qui ne lâche pas la bride, fait avancer la musique et, surtout, dirige bien un Singspiel, qu’il inscrit dans un Sturm und Drang éruptif. Cette agitation de pantin dégingandé ne sera donc pas prise pour de la pose... Et si l’énergie parfois s’assortit d’une certaine violence, dont la partition n’est pas forcément exempte, il sait aussi raffiner le détail, faire saillir les contrechants – superbe partie centrale de « O wie ängstlich ». On lui pardonnera donc des ralentis excessifs – et poseurs, pour le coup – dans « Martern aller Arten »... L’Orchestra La Scintilla suit, certes un peu bousculé ici ou là, le chœur est excellent.


Cela fonctionne d’autant plus que la distribution est jeune et forme un très bel ensemble, même si certains convainquent plus que d’autres. Olga Peretyatko éblouit par sa santé vocale, l’homogénéité de la tessiture dans un rôle périlleux qui, malgré ses suraigus, demande médium et grave, par l’agilité virtuose de la vocalise, l’éventail dynamique. Il reste que la soprano russe est plus chanteuse qu’interprète : on chercherait en vain les doutes, les frémissements de l’héroïne mozartienne chez cette Constance trop froide. Pas moins parfait, avec un « Ich baue ganz » d’anthologie, Pavol Breslik laisse en revanche percevoir, à travers la noblesse solaire du phrasé, la mélancolie de Belmonte – on pense parfois à Fritz Wunderlich. Qui ferait mieux aujourd’hui ? Voix puissante et style sûr, son Pedrillo n’a plus rien du valet : bien plus que l’ombre de son maître, Michael Laurenz en serait presque un double héroïque – avec une Sérénade d’ailleurs un peu trop surjouée. Claire de Sévigné crée la surprise par sa Blonde pétillante et fruitée, ne réduisant pas la suivante à ses aigus, mais projetant toute sa voix, jusqu’aux graves problématiques du duo avec Osmin. On suivra de près une carrière déjà si prometteuse. La seule déception vient de Nahuel di Pierro : on comprend qu’il préfère une sobriété stylée à la truculence bouffonne, mais il lui manque décidément la noirceur et la profondeur d’Osmin.


Pas de dialogues parlés : assis à une table, le pacha Selim de Sam Louwyck est en réalité un narrateur – le librettiste peut-être. Son récit casse le rythme, n’en finit plus, agace très vite. Pour éviter l’allemand ? A l’époque des surtitres, cela n’a aucun sens, d’autant plus que les chanteurs jouent, rodés par les deux premières présentations zurichoises, où Sam Louwyck incarnait pour de bon le pacha.



Didier van Moere

 

 

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