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«Ariadne auf Naxos» fait son miel entre idéalisme et espièglerie

Zerbinette (Marie-Eve Munger) joue à l'escarpolette façon Fragonard avec ses complices Brighella (Aurélien Reymond-Moret), Truffaldin (Daniel Golossov), Scaramuccio (François Piolino) et Harlekin (Johnathan McCullough).

Décidément, le tandem David Hermann et Frank Beermann fait des étincelles à l'Opéra de Lausanne! Après des «Lustigen Weiber von Windsor» bien givrées en 2014, les deux complices allemands sont de nouveau réunis pour défendre l'une des plus grandes réussites de Richard Strauss, «Ariadne auf Naxos».

Jouant sans cesse sur la convention théâtrale, le livret vertigineux et tarabiscoté de Hugo von Hoffmanstahl convie le public à assister aux préparatifs d'un double spectacle, chahutés par la décision du commanditaire de représenter la tragédie et la comédie en même temps, au grand dam du compositeur. Le drame d'Ariane, abandonnée par Thésée et sauvée par Bacchus, sera ainsi contaminé par les facéties d'une troupe de saltimbanques jusqu'à ce que l'amour des héros emporte les forces divergentes.

Un vaudeville surréaliste

Orfèvrerie chatoyante oscillant entre ironie, persiflage, maniérisme et intensité dramatique, la partition exige une réactivité de chaque instant, un dosage subtil du souffle frénétique ou retenu. Frank Beermann trouve avec l'OCL un terrain de jeu à sa mesure. Il y a une réelle prouesse du chef à tisser le fil de ces moments contrastés, malgré l'enchevêtrement touffu des thèmes. La lisibilité n'exclut pas le raffinement.

David Hermann adopte un point de vue a priori loufoque. Des coulisses du prologue, il ne montre que trois portes s'ouvrant toujours sur un arrière-fond différent, et traite la farce comme un vaudeville surréaliste. Mais qui débouche sur un échange inattendu et bouleversant entre le compositeur (impressionnante Deirdre Angenent) et une Zerbinette moins superficielle qu'on ne l'imagine (étourdissante Marie-Ève Munger). Dans l'opéra proprement dit, la juxtaposition du décor tragique et du sous-bois rococo où règne le Pierrot de Watteau aurait pu figer l'intrigue dans une posture artificielle. Elle se fige en effet, mais à la toute fin, dans un tableau hétéroclite et souriant, après avoir brassé tous les sentiments et fait chavirer les cœurs pourtant attachés à leurs convictions respectives. Et les héros Ariane (Christina Nilsson) et Bacchus (Michael König) triomphent dans un même élan lyrique et mystique.