Le joueur de flûte de Benjamin, retour parisien gagnant

- Publié le 13 avril 2019 à 11:21
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Sous l'oeil de sir George, retour à Paris d'Into the Little Hill, essai lyrique transformé depuis.

Joie de retrouver la première incursion dans le champ lyrique de George Benjamin, Into the Little Hill, treize ans après sa création dans le cadre du Festival d’automne à Paris. Depuis, le compositeur britannique a plus que confirmé ses talents opératiques dans deux ouvrages d’une tout autre ampleur, Written on Skin (Aix 2012) puis des Lessons in Love and Violence (Covent Garden 2018) que l’Opéra de Lyon accueille en ce mois de mai.

Mais les deux chefs-d’oeuvre n’ont pas occulté le charme de ces trois petits quarts d’heure de musique qui nous paraissent — à moins que notre mémoire ne nous trahisse — plus chaleureusement flattés dans l’écrin à l’italienne de l’Athénée qu’entre les dalles froides de l’Amphithéâtre Bastille, en 2006. L’instrumentarium, d’une singulière étrangeté (une quinzaine de musiciens jouant cymbalum, banjo, mandoline, cornets, flûte basse…), sonne avec beaucoup de présence — mais sans surcharge, la clarté de la ligne vocale prime — dans la fosse où a pris place l’Ensemble Carabanchel et qu’anime Alphonse Cemin, chef de chant bien connu du public du collectif Le Balcon, et ici chef à part entière.

La régie de Jacques Osinski raconte avec simplicité ce conte lyrique adapté du joueur de flûte de Hamelin, légende médiévale où un ministre et un inconnu signent un pacte sur l’extermination de rats, visibles sur les vidéos oniriques projetées sur un tulle, où défile aussi le paysage de la petite colline du titre. Le théâtre de Martin Crimp, librettiste que Benjamin retrouvera à chaque aventure lyrique, est ici encore davantage allusif et distancié que narratif. Mais il lui faut des incarnations fortes, ce que ne proposent pas tout à fait les deux fidèles du Balcon distribuées : avec la mezzo Camille Merckx, malgré la belle qualité du timbre, et surtout la soprano Elise Chauvin, peu sonore en dépit d’un indéniable engagement, nous sommes loin des grands formats (Hilary Summers et Anu Komsi) alignés à la création.

Pas de drame puisque c’est l’instrument qui ensorcelle le rat et c’est lui qui nous enchante : en particulier la flûte, qui introduit cet ouvrage par le court solo Flight du jeune Benjamin (1979). Un oiseau sautillant sur une branche quand il ne prend pas son envol sous les doigts pleins de ressources de Claire Luquiens, un merle parfois moqueur et batailleur venu du noir mystérieux et y retournant. Magique flûte !

Into the Little Hill de George Benjamin. Paris, Athénée Théâtre Louis-Jouvet, le 11 avril. Jusqu’au 20 avril.

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