Catherine Hunold conquiert les coeurs dans Pénélope au Théâtre du Capitole

Xl_6h8a7141-panorama © Patrice Nin

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les mélomanes français n’ont pas l’occasion d’entendre souvent la Pénélope de Gabriel Fauré, et mis à part une production à l’Opéra national du Rhin il y a cinq ans, l’ouvrage est par ailleurs toujours donné en version de concert, comme cela a été le cas en ce vendredi 23 octobre au Théâtre du Capitole. Cependant, sans qu’il y ait un rapport avec la crise sanitaire (Christophe Ghristi avait opté pour cette solution bien avant...), c’est dans une version pour piano que l’ouvrage fauréen est donné, un piano ici confié à la talentueuse Anne Le Bozec qui parvient, grâce à la délicatesse et la justesse de son approche, à rendre tout le frémissement, la subtilité et le mystère de la partition du compositeur ariégeois. Son toucher, à la fois précis et lumineux, vient par ailleurs soutenir les chanteurs dans leurs aspirations de beauté et d’esthétique, qui sont ici au cœur du sujet. 

A défaut d’avoir pu aller l’applaudir dans Tannhäuser à Rouen en début de mois, suite à l’annulation pure et simple du spectacle pour cause de Covid-19, c’est donc dans la Ville rose que l’on retrouve notre soprano dramatique nationale, Catherine Hunold, dans un rôle-titre en parfaite adéquation avec ses moyens naturels. Ni nous-mêmes ni le public toulousain ne sommes près d’oublier cette Pénélope frémissante, au maintien royal, à la discipline vocale parfaite, à la déclamation large et animée par un souffle unique, et joignant l’héroïsme à la fragilité. Une grande incarnation du personnage née sous la plume d’Homère !

S’il nous avait fait peur en Pollione la saison passée sur cette même scène (après y avoir campé un magnifique Alfredo un an auparavant), le ténor espagnol Airam Hernandez retrouve tous ses moyens et convainc à nouveau en délivrant un Ulysse fougueux, lançant de manière éclatante ses mots, même si quelques-uns laissent entrevoir ses origines ibériques. Un point de détail, largement contrebalancé par une ligne musicale parfaitement domptée, qui fait notamment merveille dans le long monologue qui ouvre l'acte III.

De son côté, Frédéric Caton chante un très digne et très émouvant Eumée, le vieux et fidèle serviteur d’Ulysse, tandis que la superbe mezzo française Anaïk Morel - plébiscitée in loco dans le rôle du Compositeur d’Ariane à Naxos l’an passé (aux côtés de Catherine Hunold dans le rôle-titre) - offre à Euryclée son timbre sombre, opulent et d’une rare richesse. Aucune faille non plus dans le choix des Servantes : Andreea Soare en Alcandre, Céline Laborie en Phylo, Sonia Menen en Lydie, Olivia Doray en Mélantho, et Victoire Bunel en Cléone, tandis qu’on ne pouvait pareillement trouver meilleur quatuor de Prétendants que celui formé par Mathias Vidal (Antinoüs), Marc Mauillon (Ctésippe), Enguerrand de Hys (Léodès) et Thomas Dolié (Eurymaque).

A noter qu’à cause de cas de Covid parmi les Chœurs du Théâtre du Capitole, ces derniers n’ont pas pu se produire, et ce sont les solistes qui ont de ce fait assumé les quelques rares interventions chorales dont est pourvue la partition…

Emmanuel Andrieu

Pénélope de Gabriel Fauré au Théâtre du Capitole, le 23 octobre 2020

Crédit photographique © Patrice Nin

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