Charles Gounod (1818–1893)
Faust (1859)
Opéra en cinq actes
Livret de Jules Barbier et Michel Carré d'après le premier Faust de Johann Wolfgang von Goethe
Créé à Paris, Théâtre lyrique, le 19 mars 1859
Créé à l'Opéra de Paris (Salle Le Peletier) le 3 mars 1869.

Direction musicale Bertrand de Billy
Mise en scène Frank Castorf
Décors Aleksandar Denić
Costumes Adriana Braga Peretzki
Lumières Lothar Baumgarte
Assitant à la mise en scène Wolfgang Gruber
Vidéo Martin Andersson
Caméra et montage Tobias Dusche, Daniel Keller
Dramaturge Ann-Christine Mecke
Faust Juan Diego Flórez
Marguerite Nicole Car
Méphistophélès Adam Palka
Valentin Étienne Dupuis
Siébel Michèle Losier
Wagner Martin Häßler
Marthe Monika Bohinec
Chor der Wiener Staatsoper
Chef des chœurs Thomas Lang
Orchester der Wiener StaatsoperProduction de la Staatsoper Stuttgart
Vienne, Staatsoper, 23 mai 2021, 19h30

La nouvelle direction de Bogdan Roščić essuie les plâtres de la pandémie, et la saison a été amputée de bonne part des nouvelles productions prévues, au mieux présentées en streaming, comme le somptueux Parsifal dont nous avons rendu compte. C’est aussi le cas de ce Faust de Gounod, signé Frank Castorf, qui a été proposé en ligne fin avril, avant que la réouverture des salles en Autriche ne permette deux représentations au mois de mai. D’autres nouvelles productions s’accumulent en ce printemps : L’Incoronazione di Poppea (Jan Lauwers venue de Salzbourg) et Macbeth (Prod. Kosky venue de Zurich). Le temps perdu n’est pas rattrapé, mais le temps restant est très vite rempli à Vienne.
Comme la plupart des nouvelles productions de l’année destinées le plus souvent à rafraîchir le répertoire, ce
Faust vient d'ailleurs, de Stuttgart dans ce cas et nous en avons rendu compte (voir ci-dessous), mais le travail de Castorf a été un peu revu, et surtout la distribution complètement nouvelle. Il en résulte un spectacle à la fois passionnant et musicalement exceptionnel.

L'un des facettes du décor à entrées multiples d'Aleksandar Denić

Pour comprendre le travail de Castorf, il faut partir de ce que représente l’opéra de Gounod dans le monde fantasmatique français : à savoir un des emblèmes de l’opéra français, un des emblèmes du Second Empire de Napoléon III conquérant et triomphant (1859, année de création de Faust, c’est l’année de Solferino, mais 1860 celle de la visite de Napoléon III en Algérie où il caresse le rêve d’un Royaume Arabe sous protection française, alors qu’il considérait jusqu’alors l’Algérie plus ou moins gérée par le général Bugeaud (de sinistre réputation) comme un boulet. Nous sommes à un moment où l’on va basculer sur les conquêtes coloniales (plutôt sous la IIIe République. C’est justement l’idée d’une France qui se rêve conquérante et coloniale que Frank Castorf passionné par l’histoire, propose dans ce Faust.
Le deuxième rêve c’est le rêve romantique et bourgeois du couple idéal, et la morale bourgeoise qui se construit à la même époque : il va citer alors Baudelaire dont Les Fleurs du Mal sont condamnées en 1857 au nom de cette morale et Rimbaud, contre l’armée (on se souvient du Dormeur du Val, mais c’est un autre texte bien plus terrible qui est cité par Castorf « Démocratie »  issu des Illuminations : « Le drapeau va au paysage immonde, et notre patois étouffe le tambour.
"Aux centres nous alimenterons la plus cynique prostitution. Nous massacrerons les révoltes logiques.
"Aux pays poivrés et détrempés ! – au service des plus monstrueuses exploitations industrielles ou militaires.
"Au revoir ici, n'importe où. Conscrits du bon vouloir, nous aurons la philosophie féroce ; ignorants pour la science, roués pour le confort ; la crevaison pour le monde qui va. C'est la vraie marche. En avant, route ! »

Texte prophétique qui éclaire bien des images dont celle d’une armée qui revient triomphante de conquêtes sanglantes (chez Castrof, des légionnaires de la Légion étrangère) et l’usage dégradant qui est fait du drapeau durant le gouvernement de Vichy. Aleksandar Denic, génial créateur de ses décors « à la Frankenstein » où il concentre en une construction à la fois concrète et abstraite un paysage parisien total, montre une affiche du Maréchal Pétain et à côté une vieille affiche pour Vichy Célestins… Il en faut des litres d’eau de Vichy pour digérer l’Etat Français
Ce Faust est donc d’abord contextualisé par l’histoire d’une France en creux, non pas des valeurs républicaines, mais de leur perversion : ainsi de Valentin qui écrit L’Algérie est française dans le métro. France coloniale, France bourgeoise, à la morale étriquée (qui à l’écran nous est montrée par des pubs des années 50 ou 60 ‑la période de la guerre d’Algérie- valorisant l’idéal du confort petit-bourgeois du couple, si bien que tout naturellement c’est Mephisto le personnage diabolique qui est posé comme personnage principal d’une histoire qui dépasse le Faust de Gounod ou l’élargit.
Plusieurs années avant Tobias Kratzer à l’Opéra de Paris cet hiver, Castorf pose ce Faust comme parisien : il l’insère dans un paysage de boutiques, de bistrots, de mansardes, de métro : comme souvent chez Castorf, la temporalité se superpose tel un hypertexte.

L'immeuble parisien au XIXe : plus c'est haut et moins c'est riche

On y a droit aux mansardes des films des années 40, ou issues de Louise de Charpentier (1900) sinon à celles des Scènes de la vie de Bohème de Murger. Kratzer (qui sans doute connaît la production de Castorf) quant à lui mettait Marguerite dans des « scènes de la vie de Bohème » d’aujourd’hui, dans un habitat populaire de banlieue, Castorf la place dans une mansarde du type de ceux des immeubles parisiens du XIXe issus de notre imaginaire littéraire ou cinématographique. Castorf, comme Kratzer après lui, utilise aussi Notre-Dame comme centre du dispositif (chez Kratzer la tour de Notre-Dame est le refuge de Mephisto…) et autour de cette tour s’organise tout le décor : car la morale religieuse est évidemment au centre de l’affaire : n’oublions pas la réaction de Valentin et du peuple lors de la Kermesse de l’acte II contre Mephisto
« C'est une croix qui, de l'enfer,
Nous garde ! ». La lecture en est claire : le Faust de Gounod est un Faust petit-bourgeois à la religion qui confine à la superstition. Que Mephisto se dresse en ennemi de ce peuple-là, et que Castorf le valorise à ce point n’a rien d’étonnant, lui qui a toujours combattu la bien-pensance, jusqu’à ses déclarations de l’an dernier contre les mesures sanitaires anti-Covid liberticides et infantilisantes.
Alors le Paris proposé est à la fois un Paris de toujours et un Paris du jour : du jour, les tentes des émigrés sous les escaliers de fer d’un supposé métro Stalingrad. Stalingrad pour le symbole de la deuxième guerre mondiale (toujours la guerre…) et pour ce qu’est le quartier Stalingrad aujourd’hui, avec l’indication d’une sortie vers une supposée avenue Gorki qui n’existe pas à Paris mais qui existe dans nombre de mairies ex-communistes de la périphérie parisienne.
C’est bien là de la part de Castorf et de son décorateur une volonté idéologique, mais ce n'est évidemment pas que cela.

Il y a aussi le café « or noir », typique du bistrot parisien, typique des films sur Paris où se profilent les rendez-vous, les discussions, mais dont le nom sonne comme un clin d’œil à qui a vu le Ring de Bayreuth. Il y a les boutiques, et sur l’écran un Paris nocturne avec sa circulation. Une fois de plus, Frank Castorf utilise l’œuvre pour comprendre et révéler ce qu’il y a derrière le discours qu’elle porte. D’où les allusions à Baudelaire, à Rimbaud, d’où aussi les films qui éclairent la situation.

 

Appel de Marguerite à Faust (Acte III): Nicole Car (Marguerite)

Mais certaines scènes, telles que l'appel plein de désir de Marguerite à l'acte III,  devant l'écran qui la représente, ou la scène de l’église sur fond de tour de Notre Dame, sont « littérales » et en même temps magistrales et bouleversantes.

Marguerite (Nicole Car); Faust (Juan Diego Florez) Dame Marthe en arrière-plan (Monika Bohinec), le monde interlope de la nuit de Paris/Walpurgis (acte V)

D’autres idées, comme celle d’une nuit de Walpurgis au milieu du Paris interlope des prostituées, qui dans leur réduit lisent de la poésie « interdite » sont génialement trouvées – l’enfer bourgeois en quelque sorte- parce que d’une rare justesse ; et que dire de cette Marguerite derrière une grille, presque comme une grille de boutique, comme une quelconque vitrine d’Amsterdam.
Est-ce prendre prétexte de l’œuvre pour faire passer un « message » ? Ceux qui ne connaissent pas le travail de Castorf le disent à l’envi. Mais Castorf lit les livrets, connaît les contextes et fait un travail d’une implacable rigueur : Lavelli à Paris en 1975 (déjà) avait fait de même, ironisant sur la morale bourgeoise, Kratzer, en utilisant le spectaculaire, montrait la solitude des personnages, aussi bien de Faust vieilli que de Marguerite, et même Dame Marthe, tout en offrant un discours sur Paris bien voisin de Castorf
Castorf développe l’aspect militariste d’une France conquérante à l’époque de la création, dans les colonies mais aussi en Italie (contre l’Empire austro-hongrois d’ailleurs), qui a besoin de la conquête pour se légitimer : il développe l’idée d’un Faust français, voire franchouillard : rappelons pour mémoire qu’en même temps il travaillait au Faust de Goethe, sa dernière production à la Volksbühne de Berlin, et qu’ainsi la réflexion sur Faust est complètement ouverte, pour une œuvre complètement protéiforme.  Qui pourrait caractériser le mythe de Faust, au vu de la multiplicité des œuvres auxquelles il a donné vie ? Il en va de l’exploitation du mythe comme du génial décor de Denić, construit de bric et de broc, et en même temps un « tout en un », un Frankenstein fait d’éléments disparates et à la fois cohérents, parce que plongeant dans nos mythologies ; il en va de même pour les costumes qui renvoient aux « p’tites femmes de Paris », à la prostitution de luxe ou des rues, à l’imagerie qui fait d’une femme qui se donne une sorte de prostituée, a fortiori si de la « faute » naît un enfant : il y a tout cela dans cette production, parce qu’il y  a tout cela dans le substrat de l’œuvre de Gounod et le monde global auquel réfère Goethe. Le fait que Gounod l’ait réduite à une sorte de fil essentiel, l’histoire d’un pauvre amour trahi montre qu’il y a toute une série de clichés, de prérequis qui vont très bien avec l’histoire de Marguerite, mais qui n’efface en rien les contextes et l’étroitesse des esprits.

Qui aujourd’hui pourrait voir sans sourire un Faust médiéval, sinon dans une vision ironique et distanciée ? Toutes les mises en scène du Faust de Gounod aujourd’hui travaillent sur le contexte, et non plus sur la littéralité du livret, Castorf est donc à la fois un parmi d’autres, mais en même temps singulier, voire unique.
À cette production passionnante doit correspondre une distribution de haut-vol, et c’est le cas, ainsi qu’une direction musicale référentielle, c’est encore le cas.
Il est toujours passionnant de voir qu’à l’opéra, la mise en scène réussie nourrit la musique, et vice-versa. Une mise en scène médiocre affadit souvent l’impression d’ensemble, même si les choses sont magnifiques musicalement. L’un nourrit l’autre et le grandit. C’est ce que certains managers d’opéra s’obstinent à ne pas voir, ou à ne pas vouloir.
Bertrand de Billy, qui revient après avoir rompu spectaculairement avec l’Opéra de Vienne au moment du départ de Franz Welser-Möst, n’est pas très familier des podiums en France, et c’est dommage quand on entend ce Faust où l’orchestre de la Staatsoper (qui, rappelons-le constitue la grande majorité des membres des Wiener Philharmoniker) montre un feu, une passion, une énergie qu’on a entendus rarement ces derniers temps. Alors qu’il est de bon ton de sourire de cette musique, on se prend à se passionner pour certains moments (le jardin, l’église…) qui ont une grandeur presque inconnue, insoupçonnable. La clarté de la direction de De Billy laisse entendre une richesse de la partition, des constructions, des traits d’instruments qui montrent aisément que ce n’est pas le simplisme dans lequel trop de mélomanes enferment cette œuvre qui en a fait le destin exceptionnel, mais bien la construction et les trouvailles mélodiques et harmoniques.  L’opéra populaire ne veut pas dire forcément populiste : on l’avait déjà remarqué à Paris avec la production Kratzer/Viotti, c’est sans doute encore plus vrai, plus éclatant ici. De Billy est particulièrement attentif aux équilibres, au plateau dont la mise en scène exige beaucoup (les chanteurs sont disposés sur plusieurs niveaux, quelquefois cachés – et seulement visibles en vidéo) et le chef cherche à toujours les aider et les soutenir. C’est une direction grandiose, qui rend plus que justice à l’œuvre, parce qu’elle lui donne une noblesse qu’elle n’a pas toujours ou que du moins on ne lui prête pas toujours.
Soulignons l’excellente prestation du chœur de la Staatsoper, dirigé par Thomas Lang au phrasé juste, à la diction claire et qui réussit avec brio les morceaux de bravoure (la Kermesse, et le chœur « Gloire immortelle de nos aïeux » notamment)
Une très grande distribution parachève la réussite. D’abord parce que tous font un grand effort pour un français compréhensible : tous ne sont pas francophones, mais tous s’efforcent d’être clairs dans leur expression. C’est le cas de l’honnête Wagner de Martin Häßler. Bien sûr un aurait aimé une Dame Marthe plus idiomatique que Monika Bohinec, non qu’elle démérite vocalement, mais pour un tel rôle de caractère, il faut quelqu’un qui sache la langue pour colorer avec à propos, pour exprimer l’ironie : ici on manque quelque chose du personnage, même si elle fait le job comme on dit pour un public viennois qui n’est pas forcément francophone ou connaisseur pointilleux du Faust de Gounod.

Mort de Valentin : Marguerite (Nicole Car) maudite par Valentin (Etienne Dupuis)

Excellent dans sa composition et son chant Etienne Dupuis est Valentin. Il compose une figure de soldat obtus et son investissement scénique est notable. Vocalement, aucun problème de phrasé, de diction (il est né au Québec) et il chante en soulignant les mots, les couleurs, les accents et les inflexions. Autant le rôle est ingrat (en particulier dans cette production) autant il est ici parfaitement dominé.

Michèle Losier (Siebel)

C’était Kate Lindsey à la vidéo, c’est Michèle Losier qui chante ce soir Siebel, avec la même justesse qu’à Paris, même si le personnage est radicalement différent ce dont son chant tient compte en s’adaptant. Ce Siebel est femme, plus mûre, installant une relation trouble à Marguerite, mais ce n’est jamais lourd et finalement importe peu : on se trouve devant un personnage marqué par le malheur et la souffrance, un personnage de femme presque parallèle à Marguerite,  lui aussi piétiné par la guerre et les soldats, vêtu à la fin comme une femme arabe en sang au retour de la guerre d’Algérie,
Nicole Car est Marguerite. Le soprano australien qui nous avait beaucoup séduit cet automne dans Tatiana d’Eugène Onéguine sur cette même scène, propose une Marguerite peut-être plus intéressante dans la deuxième partie (plus tragique) que la première, plus brillante, plus romantique mais moins vécue peut-être. Le chant n’est pas en cause, tout est parfaitement en place, à la fois puissant et avec un bel appui, mais plutôt le personnage. Il est vrai qu’il est difficile de composer cette figure ambiguë de fille à la fois assez facile, et en même temps amoureuse, une fille qui a vécu (au contraire de l’image habituelle de Marguerite) une sorte de prostituée à cœur disponible. Et la voix aux centres somptueux a quelquefois l’aigu un tantinet tendu, mais c’est véniel. La deuxième partie dramatique (aussi bien la scène de l’église, que la scène finale) est vraiment réussie, elle y est bouleversante, avec un chant habité et très émouvant, d’autant que pour chacun des protagonistes, la performance est triple, en direct, en vidéo directe et en gros plan comme souvent chez Castorf, et en film.

Anges purs… Nicole Car (Marguerite), Juan Diego Flórez (Faust) Adam Palka (Méphisto)

Juan Diego Flórez est Faust : c’est une prise de rôle et il y est particulièrement engagé et convaincant. Dans sa carrière faite essentiellement de bel canto, je ne pense pas qu’il ait rencontré de mise en scène d’une telle complexité ni densité. Il incarne parfaitement le personnage, jeune et finalement assez tendre, un objet entre les mains de Méphisto. Il est aussi convaincant sur scène et à l’écran. Son français est impeccable, sans l’ombre d’un accent, mais avec un soin remarquable pour les couleurs, les subtilités, les nuances . La légèreté de la voix est compensée par un phrasé et un art de la projection exemplaire, par un sens du dire exceptionnel avec les aigus stratosphériques exigés par le rôle. Son « Salut demeure chaste et pure » est fabuleux de tendresse et de vérité. À vrai dire, il est tout à fait étonnant de voir avec quelle facilité il s’est glissé dans le personnage voulu par Castorf sans difficulté, voire avec gourmandise. Voilà à quoi on reconnaît les grands artistes et les intelligences : il allie une science du chant qu’il n’a plus à prouver avec un engagement physique et expressif qui laisse loin derrière les Faust qu’on voit en scène, y compris récemment. Magnifique prestation.

Méphisto (Adam Palka) en version magicien

Magnifique prestation également d’Adam Palka, qui était déjà Mephisto dans la production de Stuttgart puisqu’il était déjà membre de la troupe, à laquelle il appartient toujours. Certes, il n’a pas le phrasé ni la clarté de la diction française qu’on pourrait attendre, mais il a tout le reste : l’aisance scénique pour un rôle dans lequel il explose de vitalité, d’intelligence, d’ironie aussi ; on pourrait craindre qu’un français moins fluide l’empêche de donner au rôle les couleurs, l’ironie et le sarcasme nécessaires… Pas du tout, il est le personnage jusqu’au bout du corps, avec là encore une gourmandise où l’on sent qu’il adore ce qu’on lui fait faire. Il a eu la chance de travailler lors de la création du spectacle dont il est la totale incarnation : il est magicien, prêtre vaudou, il est aussi satyre avec ses pattes de bouc. Et il s’impose vocalement avec une vraie puissance, et une véritable homogénéité du grave à l’aigu. Il est simplement étourdissant comme la version « humaine » du décor protéiforme de Denić. On peut avoir dans Mephisto des basses chantantes, presque des barytons-basses, il est ici une vraie basse (il chante aussi Boris) qui s’installe dans le rôle avec une assise qui en fait l’un des meilleurs, sinon le meilleur aujourd’hui.

Et en version plus diabolique (avec Nicole Car)

On sort doublement joyeux, d’abord de voir un spectacle en public, on en a vu encore si peu que c’est à chaque fois une source d’étonnement et de réel plaisir, et ensuite d’avoir assisté à une très grande représentation, sans aucune faille, avec un réel engagement de tous, chanteurs, chœur, orchestre. Deux Faust exceptionnels en ce printemps 2021, à Paris et à Vienne. Deux grandes productions. Gounod a ce qu’il mérite.

Juan Diego Flórez (Faust)
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Guy Cherqui
Agrégé de Lettres, inspecteur pédagogique régional honoraire, Guy Cherqui « Le Wanderer » se promène depuis une cinquantaine d’années dans les théâtres et les festivals européens, Bayreuth depuis 1977, Salzbourg depuis 1979. Bouleversé par la production du Ring de Chéreau et Boulez à Bayreuth, vue sept fois, il défend depuis avec ardeur les mises en scènes dramaturgiques qui donnent au spectacle lyrique une plus-value. Fondateur avec David Verdier, Romain Jordan et Ronald Asmar du site Wanderersite.com, Il travaille aussi pour les revues Platea Magazine à Madrid, Opernwelt à Berlin. Il est l’auteur avec David Verdier de l’ouvrage Castorf-Ring-Bayreuth 2013–2017 paru aux éditions La Pommerie qui est la seule analyse parue à ce jour de cette production.

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