© Stefan Brion

Inauguré avec Hulda de César Franck au Théâtre des Champs-Élysées, le neuvième Festival du Palazzetto Bru Zane se poursuit à l’Opéra-Comique avec la représentation de Phryné en version de concert. Bien qu’elle soit rarement jouée de nos jours, cette partition de Saint‑Saëns connut un triomphe lors de sa création en 1893 grâce à son caractère léger et énergique rappelant les opéras bouffe d’Offenbach. Fidèle à sa mission de valorisation et de diffusion de la musique romantique française, le Palazzetto proposait de redécouvrir l’œuvre dans une version inédite, celle de 1909, dans laquelle les dialogues parlés initiaux ont été transformés en récitatifs par André Messager.

L’intrigue est banale et conventionnelle : l’archonte Dicéphile est un vieillard imbu de lui‑même qui est tourné en ridicule par le trio que forment son neveu Nicias, la courtisane Phryné et la suivante de celle-ci, Lampito. Piégé par Phryné qui lui apparaît momentanément sous les traits d’Aphrodite, le magistrat est contraint de léguer une partie de sa fortune à son parent endetté. Chaque personnage semble être une caricature de lui-même et l’effet comique qui en découle est renforcé par l’engagement théâtral des différents chanteurs. Thomas Dolié campe un Dicéphile mesquin au timbre sombre qu’il est plaisant de détester, Cyrille Dubois est un Nicias juvénile et téméraire à la voix transparente et légère, Anne‑Catherine Gillet incarne Phryné avec grâce et naturel tandis que la voix chaude et puissante d’Anaïs Constans confère un caractère rassurant et protecteur à Lampito.

Face à l’Orchestre national d’Île-de-France, Hervé Niquet donne le ton de la soirée dès son entrée en scène : elle sera colorée et menée avec vivacité. Sa gestuelle est précise, ses intentions sont claires. Les soli des instruments à vents qui parsèment l’œuvre sont finement mis en valeur, rendant justice à l’orchestration à la fois brillante et équilibrée de Saint‑Saëns. On applaudit particulièrement la souplesse et la pureté de son des clarinettes et des flûtes dont les lignes mélodiques figurent le ressac des vagues dans le bel air de Phryné, « Un soir, j’errais sur le rivage ». En résumé, une très belle prestation qui fut longuement applaudie par le public. 


Aurianne Bec

À lire : notre compte rendu de Phryné de Saint-Saëns (CD PBZ)


Anne-Catherine Gillet (Phryné). © Stefan Brion