Tout le charme de Haydn
Rita Gorr n’a sans doute jamais chanté d’opéra de Haydn, mais nul ne reprochera à Stefano Mazzonis d’avoir dédié la première de "La Vera Costanza" vendredi à la grande mezzo belge disparue le weekend passé. Et pas seulement parce que Gorr avait commencé sa carrière en remportant le Concours de Verviers, dont on sait les liens historiques avec l’Opéra de Liège.
- Publié le 30-01-2012 à 04h16
Rita Gorr n’a sans doute jamais chanté d’opéra de Haydn, mais nul ne reprochera à Stefano Mazzonis d’avoir dédié la première de "La Vera Costanza" vendredi à la grande mezzo belge disparue le weekend passé. Et pas seulement parce que Gorr avait commencé sa carrière en remportant le Concours de Verviers, dont on sait les liens historiques avec l’Opéra de Liège.
Même si l’on sait la musique de Haydn souvent splendide, on avait quelque crainte sur la possibilité d’en goûter la qualité dans un cadre scénique qui risquait de trahir les faiblesses d’un livret passablement abscons. Le pari est pourtant brillamment tenu par la grâce - au propre comme au figuré - de la belle production d’Elio De Capitani.
Même si, au rideau final, on continue à trouver l’action totalement gratuite (stupide) et inutilement tarabiscotée, le metteur en scène italien sait donner une substance à chaque personnage et, surtout, à teinter le tout d’une délicieuse et très poétique folie. On admire la talentueuse traduction visuelle de chaque air, on se ravit de l’inventivité des décors de Carlo Sala et des costumes de Ferdinando Bruni, mêlant classicisme et éléments contemporains, et on loue la direction d’acteurs. Et au final, on se réjouit même que Rosina, pauvre pêcheuse mais seule personne sensée de l’histoire, finisse par reconquérir le cœur du Comte Errico qui l’avait épousée puis aussitôt quittée sans même savoir qu’elle allait lui donner un fils. Dans la fosse, on loue l’efficacité et le métier de Jesus Lopez Cobos dirigeant un orchestre de l’Opéra Royal de Wallonie aminci pour l’occasion. On pourrait certes rêver d’une direction plus en phase avec la rhétorique "baroqueuse", voire d’instruments anciens, mais le soutien orchestral est d’une impeccable netteté, et attentif aux chanteurs. Et le clavecin de Sylvain Bousquet, inventif jusqu’à l’anachronisme, apporte sa douce contribution à la folie ambiante. Tout le plateau est celui qui avait été constitué lors du Concours Toti dal Monte à Trévise en 2009 (un concours qui a pour objet de recruter toute la distribution d’un ouvrage du répertoire changeant chaque année) et qui a tourné depuis avec la production. C’est dire que les Federica Carnevale (magnifique Rosina), Andrea Puja (brillante Irene), Gianluca Margheri (désopilant Villotto) et les autres (Arianna Donadelli en Lisetta, Anicio Zorzi Giustiniani en Comte, Cosimo Panozzo en Ernesto et Elier Munoz en Masino) incarnent leur rôle avec expérience et talent. On peut éventuellement mégoter sur l’un ou l’autre détail, mais le septuor fait merveille, tant dans ses interventions solistes que dans les splendides ensembles qui terminent le premier et le deuxième acte.
Liège, Palais Opéra, les 31 janvier, 2 et 4 février à 20h; retransmission en direct sur Dailymotion ce mardi 31. Rens. : 04.221.47.22 www.operaliege.be