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Un bijou de Bizet sans son écrin

Sonya Yoncheva, soprano à la colorature dramatique, agile et jamais acide. Pierre Grosbois

Les Pêcheurs de perles à l'Opéra-Comique : un classique kitsch pas facile à mettre en scène.

Une fois de plus, l'Opéra-Comique est dans sa mission en explorant son cœur de patrimoine: cela faisait beaucoup trop longtemps que l'on n'avait pas entendu Les Pêcheurs de perles, ce bijou de Bizet dont nos parents et grands-parents fredonnaient par cœur paroles et musique. On se réjouissait donc de retrouver ce joyau de l'orientalisme XIXe, dans la salle où il s'épanouit le mieux. Dire que l'on a été comblé serait pour le moins exagéré. Ne serait-ce qu'à cause de la mise en scène de Yoshi Oïda, un choix qui s'est finalement révélé une fausse bonne idée.

Le grand homme de théâtre japonais, proche de Peter Brook, n'a pas su quoi faire de ce livret au kitsch très pompier. Le fond de scène incliné aux reflets bleutés, censé évoquer la mer de Ceylan où des danseurs font mine de plonger, devient vite lassant, le souci louable de dépouillement ne faisant que davantage ressortir une direction d'acteurs ringarde, renouant avec les poses main sur le cœur face au public que l'on voyait il y a cinquante ans. Ni tout à fait exotiques, ni tout à fait réalistes, les costumes restent dans un entre-deux peu éloquent.

Un soin consacré à la diction

De cet opéra très vocal, reposant sur les épaules de trois interprètes, on n'a pas toujours goûté les charmes mélodiques, même s'il faut souligner le soin consacré à la diction. Le ténor Dmitry Korchak a la voix claironnante et serrée, sans la douceur et les nuances requises. Ajoutez à cela qu'il détonne et détimbre : on souffre. Avec un français parfait et des moyens considérables, le baryton André Heyboer donne du relief à Zurga, quitte à charger sa barque de pêcheur: la voix est puissante mais peu modulée, et les sons dans les joues lui font perdre en clarté.

Le seul bonheur sans mélange vient de la soprano Sonya Yoncheva, rare exemple de colorature dramatique, agile mais jamais acide, d'un rayonnement qui appartient aux grandes. Le Chœur Accentus accuse au début des stridences pénibles et une diction floue, avant de se reprendre, tandis que le chef Leo Hussain a la main lourde. Défendant une conception plus dramatique qu'éthérée, il donne du tonus au spectacle mais grossit le trait au détriment de la poésie, à la tête d'un Philharmonique de Radio France dont il faudrait retenir plutôt qu'encourager la puissance naturelle.

Jusqu'au 28 juin. Opéra-Comique (Paris IIe). Tél.: 0825 01 01 23 etwww.opera-comique.com

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