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Vénus et Adonis, premier opéra anglais en demi-teinte

Le soprano Céline Scheen dans le rôle de Vénus, et le baryton Marc Mauillon dans celui d'Adonis. Delval Philippe

La salle Favart accueille Vénus et Adonis de John Blow, un masque anglais antérieur au Didon et Énée de Purcell, qui pèche par manque de dramaturgie.

Pur produit de la tradition britannique, maître à chanter - et à penser - de Henry Purcell, John Blow reste surtout connu des amateurs de baroque pour sa musique sacrée. Pourtant, il est aussi le père de l'un de ces masques typiques d'Albion, écrit pour le divertissement du roi Charles II et qui aurait pu servir de modèle à ce que l'on a coutume de considérer comme le premier opéra anglais: Didon et Énée.

Sa Vénus et Adonis, relecture tragique du mythe amoureux, est un bijou de poésie et d'élégance, où la légèreté, comme chez Purcell, le dispute au drame. Il n'est donc nullement question de remettre en cause les qualités musicales de l'œuvre: la nouvelle production que propose l'Opéra-Comique (créée en octobre au Théâtre de Caen) est avant tout l'occasion de redécouvrir ce bref chef-d'œuvre, subtil alliage de grâce pastorale et de sensibilité doloriste. On s'interrogera en revanche sur la pertinence du passage d'un tel ouvrage à la scène. Car une fois passée la poétique claire-obscure et onirique de la partition, l'absence de véritable dramaturgie, eu égard au miracle théâtral que sera ­Didon et Énée, laisse le spectateur sur sa faim. La mise en scène de Louise Moaty, dont on avait tant aimé le Rinaldo épique et sensuel, semble s'enliser dans une esthétique de Vanités et d'éclairages à la bougie qui soulignent les faiblesses du livret, plus qu'elle ne les compense. «Le feu comme matière vivante, au même titre que le végétal ou l'animal (incarné un peu artificiellement par de véritables chiens de chasse, NDLR), les hommes et leur musique, leur plaisir, leur savoir, leur folie, viennent ici s'offrir en contraste dans la profondeur de la nuit», explique-t-elle dans sa note d'intention. Las, le plaisir et la folie firent justement défaut lors de la création, à Caen, de cette production trop dirigée vers les modes interprétatives et pas assez vers le propos théâtral ou musical. Dommage! Méritants, les enfants de la Maîtrise de Caen ont travaillé la diction baroque avec le vénérable Eugène Green.

Mais la récitation du vieil anglais ne leur est pas naturelle, et cela se sent. Le jeune orchestre des Musiciens du Paradis, sous la baguette de Bertrand Cuiller, se tire fort honorablement d'une partition fort peu jouée mais le chœur, lors de la première, ne semblait pas suffisamment prêt. Une consolation cependant: le merveilleux couple composé par Marc Mauillon et Céline Scheen. Ces derniers démontrent une fois de plus qu'ils sont bien les meilleurs espoirs de la scène baroque actuelle.

John Dowland en famille

Découvert aux côtés des Arts Florissants de William Christie, Marc Mauillon mène depuis 2002 une carrière ascendante, qui le conduit à se produire aussi bien dans le baroque que la musique contemporaine. Sa sœur Angélique n'est pas en reste: harpiste formée au CNR de Lyon, elle s'est fait une spécialité des musiques anciennes et tourne régulièrement avec les ensembles les plus réputés: Doulce Mémoire, le Concert d'Astrée ou encore Alla Francesca. Tous deux se produiront chez Dowland dans la salle Bizet du Comique, les 13 et 14 décembre à 13 heures.

Vénus et Adonis à l'Opéra Comique. Place Boieldieu (IIe). Tél.: 0825 01 01 23. Dates:du 12 au 15 décembre. Places: de 6 à 110 €

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