Le bon larron de Ponnelle

Jongen François
Le bon larron de Ponnelle

Nicolas Blanmont Envoyé spécial à Pesaro A côté des grands ("L’Italienne à Alger") ou très grands ("Guillaume Tell") Rossini (La Libre des 12 et 13 août), le Festival de Pesaro affiche aussi régulièrement les petites farces en un acte, œuvre d’un jeune compositeur de vingt ans : des ouvrages plus courts (entre une heure et une heure trente), sur des livrets convenus ou faibles (pour ne pas dire stupides), mais une verve musicale déjà impressionnante témoignant d’un vrai génie. Ainsi, cet été, on peut voir "L’occasione fa il ladro" (L’occasion fait le larron), occasion d’un hommage mais aussi de promesses.

Hommage ? Celui rendu, juste 25 ans après sa mort soudaine, au metteur en scène français Jean-Pierre Ponnelle, conspué à l’époque pour son supposé conservatisme mais dont le vrai sens théâtral - certes, dans des cadres visuels convenus, pas question avec Ponnelle de transposer l’action dans un bordel ou un supermarché - ressurgit quand on revoit ses productions. C’est le cas encore dans ce spectacle de 1987, très XIXe dans son visuel mais habile dans sa façon de recréer l’histoire au départ de rien, les machinistes se mêlant aux chanteurs pour lever et descendre à vue les toiles peintes qui constituent les décors. Certes, la direction d’acteurs semble rudimentaire, sans qu’on sache s’il faut imputer cette faiblesse au travail original ou à l’assistante qui l’a ressuscité pour l’occasion.

Dans cette improbable histoire de confusion d’identités et de mariage arrangé, la fraîcheur du spectacle vient aussi du plateau : on y trouve des vieux routiers du chant rossinien comme Roberto De Candia ou Paolo Bordogna, mais aussi des "produits" de l’Académie rossinienne de Pesaro comme les sopranos russes Elena Tsallagova et Viktoria Yarovaya ou l’élégant ténor italien Enea Scala.

Et surtout, chose rarissime, à la tête de l’orchestre de jeunes du Festival, une femme, Yi-Chen Lin. Hormis Sylvain Cambreling, l’ancien directeur musical de la Monnaie qui porte aujourd’hui un catogan qui le fait ressembler à un dessin de Cabu, on n’a pas l’habitude de voir des cheveux longs s’agiter au rythme de la baguette dans une fosse d’opéra. Passée, elle aussi, par l’Académie rossinienne (elle y dirigea "Le Voyage à Reims"), cette jeune chef taïwanaise semble encore timide et mal à l’aise quand elle vient saluer en fin de représentation. Mais pendant toute la soirée, elle dirige ses troupes avec précision et autorité, et témoigne d’une vraie compétence dans le style belcantiste.

Pesaro, Teatro Rossini, les 18 et 21 août; www.rossinioperafestival.com

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