Fidelio au Festival de Verbier

Xl_fidelio3 © Aline Paley

Comme nous le précisions dans notre papier de présentation du Festival de Verbier, l'édition 2014 fait la part belle au lyrique. Après une Damnation de Faust qui a recueilli un franc succès tant public que critique, c'est l'unique opéra de Beethoven Fidelio – auquel notre collègue Catherine Duault vient de consacrer un dossier dans nos colonnes – qui a les honneurs de l'affiche.

Dans le rôle-titre, la soprano suédoise Ingela Brimberg confirme - après sa magnifique Senta (Der Fliegende Holländer) genevoise en début de saison - qu'elle est une chanteuse sur laquelle on peut compter. Elle s'avère superbe tout au long de la soirée, avec un profil vocal aussi clair que péremptoire. Avec sa voix puissante et bien projetée, elle affronte crânement les écarts et les vocalises du superbe « Abscheulicher », au I, et donne plus encore la vraie mesure de ses moyens, au II, dans lequel ses envolées lyriques attestent d'une incroyable gestion des ressources vocales.

Si Brandon Jovanovich est un Florestan plus léger qu'à l'ordinaire, il n'en demeure pas moins capable de rendre justice à l'écriture périlleuse de son air au début du II - le fameux « Gott » - qu'il commence pianissimo, avant de le continuer fortissimo, pour le conclure de manière pianissimo : ce tour de force restera le clou de la soirée.

Philippe II (Don Carlo) au Festival de Baden-Baden en début de mois, le baryton-basse russe Evgeny Nikitin incarne cette fois le rôle de Pizarro, auquel il ne confère malheureusement pas la hargne, l'autorité et la puissance vocale attendues ici (et dont il est pourtant coutumier). On reste en revanche admiratif devant le Rocco de la basse canadienne Robert Gleadow (pour René Pape initialement annoncé) : par delà la beauté du timbre et du chant, il émeut en campant un personnage à la fois faible, humain et banal. Rien à dire, enfin, du couple Marzelline/Jaquino : Sylvia Schwartz et Bernard Richter sont à leur juste place.

Huit jours après nous avoir frappé en plein cœur dans Les Boréades de Rameau au Festival d'Aix-en-Provence, la direction de Marc Minkowski soulève à nouveau l'enthousiasme. Il entraîne le formidable Verbier Festival Chamber Orchestra - composé essentiellement de jeunes musiciens – avec lyrisme et passion, mettant constamment en valeur les détails d'une orchestration qui, on le sait, est prodigieuse. Il renonce à intercaler la fameuse Ouverture Leonore III en seconde partie - comme le veut une certaine tradition - ce qui permet à l'ouvrage de gagner en continuité dramatique, et à la scène finale d'atteindre une grandiose intensité, moment d'exception à laquelle le formidable chœur new-yorkais The Collegiate Chorale n'est pas étranger.

L'offre lyrique n'est pas terminée, et les festivaliers pourront entendre Il Rè pastore de Mozart - avec Rolando Villazon dans le rôle-titre - le samedi 2 août, puis, le lendemain, L'Elisir d'amore de Donizetti, avec les jeunes chanteurs du Solti Verbier Opera Project (financé par le Rolex Institute), dans une mise en espace de Sir Thomas Allen et sous la baguette du chef espagnol Jesus Lopez Coboz.

Emmanuel Andrieu

Fidelio au Festival de Verbier

Crédit photographique © Aline Paley

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