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Critique

Aix : le miracle renouvelé

Par Philippe Venturini

Publié le 9 juil. 2015 à 01:01Mis à jour le 6 août 2019 à 00:00

Il n'y a qu'un lit, immense, démesuré, qui investit toute la scène. Les oreillers et le drap sont blancs comme les rêves. La couverture est verte comme la forêt dans laquelle vont s'égarer et se croiser les couples mais aussi comme le tapis d'un billard dont les boules seraient les amoureux, livrés au caprice de Puck, le serviteur invisible et imprévisible du roi Obéron. Derrière, il n'y a qu'un fond de scène bleu nuit, profond comme du Raoul Dufy ou du Nicolas de Staël, où luit un croissant de lune. Malgré la sobriété de ce dispositif, Robert Carsen a signé ce qui reste l'une des productions lyriques les plus enchanteresses qui soient. Reste parce qu'elle n'est pas nouvelle : elle fut créée en ce même Théâtre de l'Archevêché en 1991 et a depuis charmé l'Europe. Bernard Fouccroulle a eu parfaitement raison de reprendre ce spectacle merveilleux tout comme le duo « Iolanta » de Tchaïkovski et « Perséphone » de Stravinski présenté en 2012 à Madrid (voir www.lesechos.fr ).

Un rêve éveillé

Quiconque découvre ou revoit ce « Songe d'une nuit d'été » de Britten quitte la salle dans un étrange état de lévitation, convaincu d'avoir assisté à un miracle ou d'avoir vu un mirage. Carsen a parfaitement saisi le propos de Britten, appuyé sur le texte de Shakespeare (lire « Avant Scène Opéra » n° 284) dans lequel la grâce le dispute à l'humour. Les deux premiers actes ne sont que pure féerie, théâtre en apesanteur, amours guidées par le pouvoir d'une fleur magique que Puck utilise maladroitement, créant ainsi des couples improbables, le plus fameux étant, bien sûr, celui de la reine Tytania, épouse d'Obéron, et de Bottom, le tisserand, transformé en âne. Le lit comme prélude au rêve et séjour de l'amour occupe ainsi tout le spectacle.

Opéra sans vedette, ce « Songe » bénéficie d'une distribution... de rêve. Si on ne peut citer tous les chanteurs, on retiendra la reine Tytania d'une féminité envoûtante de Sandrine Piau, l'Helena sensuelle de Layla Claire et les interprètes des artisans jouant « Pyrame et Thisbé » au dernier acte avec une drôlerie absolument irrésistible. Kazushi Ono dirige ce chef-d'oeuvre avec la délicatesse et la vivacité indispensables et profite d'un orchestre de l'Opéra de Lyon des grands soirs. On souhaiterait ne pas s'éveiller d'un tel « Songe ».

Philippe Venturini

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