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Témoignage de l’Histoire

Nantes
Théâtre Graslin
11/02/2015 -  et 4*, 7 novembre 2015
Viktor Ullmann : Der Kaiser von Atlantis oder die Todwerweigerung
Pierre-Yves Pruvot (Empereur Overall), Wassyl Slipak (La Mort, Le Haut-parleur), Natalie Pérez (Bubikopf, La jeune fille), Sébastien Obrecht (Arlequin (La Vie), Un Soldat), Anna Wall (Le Tambour)
Ars Nova ensemble instrumental, Philippe Nahon (direction musicale)
Louise Moaty (mise en scène), Adeline Caron (scénographie), Alain Blanchot (costumes), Christophe Naillet (lumières), Jonathan Matthieu (création son radio)

La modestie des moyens n’empêche pas l’ambition, et l’Arcal, dans une production de L’Empereur d’Atlantis réalisée avec Le Moulin du Roc de Niort et la Maison de la musique de Nanterre, et invitée sur la scène du Théâtre Graslin par Angers Nantes Opéra, l’affirme avec éloquence. Dans le cadre des commémorations du génocide juif, la Fondation pour la Mémoire de la Shoah a soutenu la mise en scène de Louise Moaty de l’opéra que Viktor Ullmann a écrit dans le camp de Terezín et que le public n’a découvert qu’en 1975, à Amsterdam, lorsque la partition, réputée perdue, a été retrouvée – la France a dû attendre vingt ans de plus pour la voir créée au Centre Pompidou.


Au-delà du témoignage de l’activité artistique de ce qui était présenté comme un camp modèle pour tromper l’opinion internationale sur la réalité concentrationnaire, l’ouvrage, oscillant entre fable et satire, renouvelle, avec une originalité contrainte par le dénuement, les recherches esthétiques et théâtrales, où l’on peut deviner çà et là les ombres de Brecht et Weill par exemple. Si l’on reconnaît les traits d’Hitler sous les traits de l’Empereur Overall, tandis que les péripéties militaires de la pièce parodient celles du nazisme, ce patchwork savamment composé distille également, au-delà du politique de circonstance, une réflexion moins circonstancielle, plus universelle, sur la condition humaine, que la musique, nourrie d’allusions plus ou moins explicites, rehausse avec intelligence.


On pourrait ainsi se laisser porter par une scénographie «à la pancarte» pour mettre en avant les coulisses de l’illusion des planches. Au travers de techniciens réglant discrètement le globe terrestre gonflable strié de méridiens qui se souvient de Chaplin, Louise Moaty démontre une certaine compréhension des enjeux formels de l’œuvre, sans toutefois souligner la scansion des tableaux, à laquelle elle préfère une fluidité narrative au relief parfois défaillant. La poésie ne fait pas défaut et convoque, sans servilité excessive, les codes visuels contemporains, à l’instar de la voix du Haut-parleur dans un canal de radiodiffusion évoquant les années trente ou quarante.


Avec son ensemble Ars Nova, Philippe Nahon détaille la subtilité presque coloriste de la partition, support d’une nervosité dramatique qui ne demande qu’à éclore. Empereur Overall d’une stature qui ne vire jamais au monolithisme, Pierre-Yves Pruvot manifeste une présence où le déclin frôle une vulnérabilité presque émouvante. Wassyl Slipak s’inscrit sans difficulté dans la transmission microphonique, quand Sébastien Obrecht incarne un Arlequin de belle étoffe. On n’oubliera pas le Tambour d’Anna Wall, portant franchement une voix sans excès, ni les apparitions de Bubikopf et de la Jeune Fille, confiées à Natalie Pérez.



Gilles Charlassier

 

 

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