Reprise de L'Enlèvement au sérail selon Tom Ryser à l'Opéra de Toulon

Xl_serail © Frédéric Stéphan

Quel plaisir de retrouver à l’Opéra de Toulon – deux mois après que nous l’ayons chroniquée au Théâtre du Capitole – la formidable production de L’Enlèvement au sérail imaginée par l’homme de théâtre suisse Tom Ryser. Pour un bonheur plus complet, la distribution réunie par l’infatigable Claude-Henri Bonnet, entièrement renouvelée par rapport aux représentations capitolines, s’y avère d’une qualité encore supérieure.

De fait, le jeune ténor ukrainien Oleksiy Palchykov est le plus rayonnant des Belmonte, qu’il aborde pour la première fois, avec un physique et une présence scénique idéales pour le rôle. Tout de ferveur amoureuse et virile, il joue subtilement de sa voix dorée, dont le lyrisme fait particulièrement merveille dans son difficile air du second acte « Wenn der Freude Tränen fliessen ». Autre prise de rôle, celle de la soprano polonaise Aleksandra Kubas-Kruk, pilier de l’Opéra de Wroclaw, sa ville natale, et elle aussi au début de sa (prometteuse) carrière. Elle possède un lumineux timbre de soprano lyrique léger, un suraigu facile, une technique assurée et, ce qui ne gâte rien, elle est ravissante aussi, formant ainsi avec Belmonte le plus crédible des couples.

Le ténor afro-américain Keith Bernard Stonum est un Pedrillo épatant de vie, de verve, et d’aisance scénique. Bien timbrée, la voix manque toutefois de sûreté dans l’aigu, et il se trouve ainsi quelque peu dépassé par la vaillance requise par l’air « Frisch zum Kampfe ». De son côté, la soprano américaine Jeanette Vecchione fait feu de tout bois en Blondine, tirant la couverture à soi avec une espièglerie presque éhontée dans son affrontement avec Osmin. Notons, au passage, la parfaite fusion de ces voix dans le quatuor qui clôt le deuxième acte, un des sommets de l’opéra, comme aussi du présent spectacle. La basse ukrainienne Taras Konoschenko campe un truculent Osmin, à la voix longue et virtuose, même si, idéalement, on aimerait encore plus de puissance dans l’aigu et l’extrême grave. Enfin, déjà présent à Toulouse – en maître de cérémonie qu’il est –, Tom Ryser joue lui-même le rôle parlé de Sélim, auquel il donne beaucoup de relief, en se montrant digne et élégant dans la clémence.

Dernier artisan de la réussite du spectacle, le chef hollandais Jurjen Hempel qui réalise ici un travail formidable sur l’Orchestre de l’Opéra de Toulon dont l’excellent niveau ne cesse de surprendre agréablement (et ce malgré le départ de son directeur musical Giuliano Carella la saison dernière). Les tempi sont alertes, les phrasés irréprochables et le jeu d’ensemble d’une précision parfaite, surtout aux cordes…  

Emmanuel Andrieu

L’Enlèvement au sérail de W. A. Mozart à l’Opéra de Toulon (avril 2017)

Crédit photographique © Frédéric Stéphan

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