Qu'il est difficile de rendre justice à un concert que l'on a apprécié mais qui intrinsèquement n'apporte pas toutes les qualités requises ! La comparaison avec de nombreux et illustres chanteurs qui ont brillé dans Don Giovanni ne tient évidemment pas quand il s'agit de jeunes chanteurs, surtout dans un lieu tel que la très belle mais très réverbérante Basilique Notre-Dame et avec le remplacement de dernière minute de l'un des chanteurs de la distribution (Nahuel di Pietro s'étant fait remplacer par Luigi De Donato qui chantait déjà la veille le rôle d'Orbanazzo dans Tancredi). Mais une soirée peut se révéler captivante par le seul jeu théâtral qui se donne sur scène. 

Si Gordon Bintner semble parfois peu idiomatique, avec un rien d'accent anglophone donnant une ligne un peu hachée, sa veulerie et son esprit propre à berner les hommes et les femmes sont bien rendus par son regard malicieux et trompeur. Son comparse Leporello est joué par Luigi De Donato qui connaît le rôle sur le bout des doigts, et possède tout le jeu d'acteur nécessaire pour évoquer la pleutrerie et l'absence de courage du serviteur de Don Giovanni. 

Malheureusement, Fabio Trümpy dans le rôle de Don Ottavio est en-deçà de ce que l'on peut attendre pour le rôle du fiancé de Donna Anna ; quelques erreurs d'émission frôlent la rupture vocale, certainement en raison d'un manque de couverture vocale et d'une volonté d'éclaircir le timbre de façon permanente, appauvrissant ainsi les harmoniques. D'autres griefs peuvent être portés à Arianna Venditelli, incarnant Donna Elvira, dont la tessiture semble peu adaptée en raison d'une voix un peu courte. Seul "Mi tradi" lui redonne une certaine assurance. En revanche, Vannina Santoni a ce qu'il faut de puissance et de pétulance pour mener à bien le rôle de Donna Anna : qu'il s'agisse de sa prononciation cristalline ou de sa capacité à moduler son contrôle vocal, ses qualités impressionnent.

Enfin, la direction de Jérémie Rhorer est attentive, alerte, vive et respectueuse des différences entre les interprètes qui peuvent ainsi plus facilement exister. Le chef d'orchestre reste à l'écoute de chacun et fait bien attention à ne couvrir personne quand il serait facile avec son effectif de faire plus d'effets sonores. 

Malgré une distribution hétérogène, et même si parfois les capacités vocales sont défaillantes, la soirée fonctionne très bien en raison de l'implication des chanteurs dont on perçoit entre eux la complicité et l'investissement pour cette œuvre si connue.

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