Opéra
Mam’zelle Nitouche, Ultime cadeau de fin d’année [Nantes]

Mam’zelle Nitouche, Ultime cadeau de fin d’année [Nantes]

25 December 2017 | PAR Gilles Charlassier

Quand on dit opérette française, on pense d’abord à Offenbach. C’est pourtant oublier un autre compositeur, un peu négligé aujourd’hui, qui revendique lui aussi la paternité du genre : Louis-Auguste-Florimond Ronger, dit Hervé. Après avoir fait redécouvrir en 2015 les inénarrables aventures des Chevaliers de la table ronde, le Palazetto Bru Zane initie, avec Pierre-André Weitz à la mise en scène, une tournée consacrée au plus grand succès du même Hervé, Mam’zelle Nitouche, à l’Opéra de Nantes, deux mois après Toulon.

Le Couronnement de Poppée réglé par le duo Patrice Caurier et Moshé Leiser en octobre avait déjà livré un remarquable exemple de la fidélité du directeur de l’Angers-Nantes Opéra, Jean-Paul Davois. La Mam’zelle Nitouche de cette fin d’année, la dernière production de son mandat, confiée à un metteur en scène dont il a accompagné l’émancipation, Pierre-André Weitz, jusqu’alors connu comme le décorateur d’Olivier Py, en offre une autre, et jubilatoire, illustration.

L’ouvrage lui-même, s’appuie sur sur un livret sans temps mort, quitte à passer au premier plan devant la partition, laquelle réserve pourtant de délicieuses trouvailles parodiques, jouant de clins d’oeil avec l’intrigue et la mise en abyme de l’opérette dans l’opérette : sans doute cette alchimie entre souvenirs autobiographiques du compositeur et jeux de théâtre fait-elle le sel inimitable d’une pièce qui se délecte des troubles du double et des faux-semblants, assaisonnée à merveille par les interprètes, sous la houlette de Christophe Grapperon, dirigeant les musiciens de l’Orchestre National des Pays de la Loire  avec la même précision que le comique millimétré sur le plateau.

On retrouve d’ailleurs des solistes qui avaient participé au succès des Chevaliers de la table ronde. Damien Bigourdan se glisse avec gourmandise dans la préciosité déclamatoire de Célestin-Floridor. Lara Neumann fait délicieusement pétiller la fausse ingénuité de Denise de Flavigny, alias Mam’zelle Nitouche, mutine et coquine. Samy Camps se livre à l’impétuosité juvénile de Fernand de Champlâtreux, quand Eddie Chignara affirme un Major matamore comme on l’attend. Sandrine Sutter ne dépare aucunement en soeur tourière et Sylvia. Le reste du plateau assume avec un égal enthousiasme les caractères hauts en couleur de ce spectacle loufoque, du directeur de théâtre confié à Antoine Philippot, aux officiers Gustave et Robert, Pierre Lebon et David Ghilardi, en passant par les froufrous de Lydie et Gimblette – Clémentine Bourgoin et Ivanka Moizan.

Mais ce sont aussi les impayables numéros d’Olivier Py que l’on retient, tant en Loriot un rien idiot, que, sous son nom de scène Miss Knife, Mère Supérieure très dame patronnesse et Corinne jalouse. Sa pantomime double-face au lever de rideau, moitié actrice, moitié soldat, résume toute l’irrésistible valse des genres et des confusions d’un texte multipliant les quiproquos. Faisant une apparition en tant que régisseur de scène – encore un jeu de théâtre dans le théâtre – Pierre-André Weitz s’appuie sur son vocabulaire scénographique éprouvé, un décor réversible sur tournette, de la pierre du couvent aux coulisses du music-hall en passant par une évocation de gare en noir-et-blanc, pour faire tourbillonner les rires et les situations et ne laisser aucun répit au plaisir du spectateur. Ceux qui auront manqué le train de Mam’zelle Nitouche pourront se rattraper lors de la tournée prévue la saison prochaine.


Mam’zelle Nitouche, Hervé, mise en scène : Pierre-André Weitz, Opéra de Nantes, jusqu’au 20 décembre 2017
Crédit : ©Jef Rabillon AngersNantesOpera

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Gilles Charlassier

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