About us / Contact

The Classical Music Network

Lille

Europe : Paris, Londn, Zurich, Geneva, Strasbourg, Bruxelles, Gent
America : New York, San Francisco, Montreal                       WORLD


Newsletter
Your email :

 

Back

Féerie potagère

Lille
Opéra
02/01/2018 -  et 3, 6, 8, 11*, 13 février 2018
Jacques Offenbach: Le Roi Carotte
Héloïse Mas (Robin-Luron), Yann Beuron (Fridolin XXIV), Christophe Mortagne (Le Roi Carotte), Christophe Gay (Truck), Boris Grappe (Pipertrunck), Chloé Briot (Rosée-du-Soir), Albane Carrère (Cunégonde), Lydie Pruvot (Coloquinte), Thibault de Damas (Dagobert, Psitt), Renaud de Rugy (Le Maréchal Trac), Florian Bisbrouck (Le Compte Schopp), Dominique Côté (Le Baron Koffre)
Chœur de l’Opéra de Lille, Yves Parmentier (chef de chœur), Orchestre de Picardie, Claude Schnitzler (direction)
Laurent Pelly (mise en scène, costumes), Chantal Thomas (décors), Joël Adam (lumières)


(© Simon Gosselin)


L’Opéra de Lille monte à son tour cette production du Roi Carotte (1872) créée à Lyon en décembre 2015. Cet opéra-bouffe sur un livret de Victorien Sardou nécessita à l’époque de considérables moyens, compte tenu de sa longueur et de ses nombreux personnages et changements de décor, ce qui explique sa rareté sur scène. Il s’agit pourtant d’un Offenbach de premier ordre, malgré l’absurdité de cette histoire loufoque : un prince, Fridolin, qui se prépare à s’unir avec Cunégonde, se voit ravir sa place par une carotte géante à cause d’un sort lancé par une sorcière, Coloquinte. Cette féerie raconte son aventure, jusqu’à Pompéi, pour se débarrasser de ce dictateur imbécile et regagner ainsi sa position, aidé par quelques comparses ; à la fin, le Roi Carotte, tout flétri, passe au presse-purée. Pour ressusciter ce drôle d’ouvrage complétement démesuré, la mise en scène échoit à Laurent Pelly, qui montre tout son sens du divertissement et de l’humour dans cette péripétie haute en couleurs, avec la collaboration d’Agathe Mélinand, qui a modernisé les dialogues sans vulgarité ni excès d’actualisation.


La vitalité et le comique propres au genre, particulièrement saillants dans cet opéra palpitant, se retrouvent pleinement dans cette production ambitieuse et pleine de fantaisie, bien que la dimension satirique demeure quelque peu au second plan. Ludique et bien pensée, la scénographie mérite le déplacement, mais Pelly ne mise pas tout sur les fantaisies et les effets visuels, remarquables, il est vrai. La direction d’acteurs se révèle affûtée et limpide, ce qui rend ces trois actes plein de bonnes idées particulièrement jouissifs et rythmés. Cette mise en scène susceptible de plaire tant aux familles qu’aux plus blasés respecte ainsi parfaitement l’esprit de cette péripétie pleine d’actions. Il paraît vraiment difficile d’en concevoir une meilleure.


La reprise à Lille réunit une distribution un peu différente qu’à Lyon, mais solide et en tous points idéale, certains reprenant du service. C’est d’abord le cas de l’inénarrable Christophe Mortagne, ténor de caractère parfait pour incarner cet improbable rôle-titre poussant de terre grâce à la magie de Coloquinte, personnage, parlé, brillamment endossé par Lydie Pruvot. Yann Beuron retrouve aussi Fridolin et prouve une fois de plus que cet emploi princier lui convient à merveille. Le ténor témoigne aussi sa grande aisance dans ce répertoire, où il se montre somptueux, de phrasé comme de timbre. Nous goûtons aussi aux prestations de ses complices Truck et Pipertrunck, fort bien tenus par Christophe Gay et Boris Grappe, mais aussi la Rosée-du-Soir revigorante de Chloé Briot, à la voix fruitée et légère. Les chanteuses excellent tout particulièrement, car il faut encore citer Héloïse Mas, épatante et pleine d’entrain en Robin-Luron, et Albane Carrère, admirable de présence et de vocalité en Cunégonde. Et tous veillent à la prononciation, une qualité indispensable.


Ennemi de l’à-peu-près et de la précipitation, Claude Schnitzler dirige avec légèreté et délicatesse un Orchestre de Picardie véritablement épanoui, à la fois précis, svelte et vigoureux, tandis que les choristes livrent une prestation enthousiasmante dans cette foisonnante partition qui leur réserve une multitude de tous petits rôles. Offenbach n’en finit décidément pas de nous régaler.



Sébastien Foucart

 

 

Copyright ©ConcertoNet.com